Le sponsoring oui mais...

Publié le par Fishing&Motion

Voilà un sujet qui alimente bien des jalousies et des hypocrisies indicatrices des énormes besoins de reconnaissance qui animent quelques uns d’entre nous. Pourtant, certains s’en désintéressent totalement, d’autres trouvent le phénomène gênant car il tronque de nombreux débats, d’autres le détestent, tout simplement. Ce sujet a au moins le mérite d’animer nos consciences sur une des conséquences de ce que nous voulons tous ici, développer la pêche de loisir.


Définition
: Le sponsoring est une stratégie économique de la valorisation commerciale d’une marque ou de produits, n’ayant qu’un seul objectif final : faire vendre. Pour cela le sponsoring passe par la recherche d’une identité pour la firme en tant qu’institution commerciale. C’est une mise en valeur aussi bien commerciale que spirituelle.

Aujourd’hui, une controverse s’est installée dans le petit monde la pêche, et la pêche aux leurres est la dernière touchée. La carpe, la mouche et surtout le coup ont eu leurs nuages noirs il y a déjà quelques années. Nous commençons juste à alimenter cette polémique, mais a-t-elle vraiment lieu d’être ?


Historique
: Le sponsoring dans la pêche des carnassiers est bien plus ancien que certains ne le croient. A la grande époque du mort manié, des grands noms étaient déjà associés à des marques. Certains changeaient de sponsors au gré des offres, passant d’une marque à l’autre, raflant les dotations, signant et déchirant les contrats. D’autres sont restés fidèles à leur marque et le sont encore aujourd’hui. L’histoire du sponsoring est aussi vieille que le monde. Ceux qui s’élèvent aujourd’hui contre un système qu’ils découvrent, ne font que construire des châteaux de sable sur l’estran. Cependant leurs arguments (pertinents) doivent être pris en compte car dans le futur, ils éviteront les dérivent que l’on constate déjà dans d’autres pays.


On peut être sponsorisé et oublier sa chemise !

Quels sont les besoins de chacun ?
Pour répondre à cette question nous allons confronter les différents objectifs de chacun des protagonistes, à savoir le sponsorisé et le commanditaire.

Sponsorisé

"Réduire ses frais"
- Alléger son budget matos : leurres, cannes moulinets, fils, hameçons.
- Participer à d’avantage de compétitions : faire prendre en charge les frais de carburant (bateau, voiture), les frais de route, le logement sur place.

Commanditaire

"Vendre"
- Se servir d’un support pas cher, en contact direct avec le terrain.
- Bénéficier d’une image valorisante calquée sur l’image désirée pour ses produits.
- Faire connaître ses produits.
- Démontrer les performances de ses produits.
- Faire preuve d’altruisme (mais c’est aussi une image).



Il ne faut pas se voiler la face, pour le sponsorisé, l’économie réalisée est énorme.

Mais il y gagne aussi sur un autre plan : l’efficacité. S’il devait acheter son matos lui-même et le perdre lui-même, il ne lancerai pas aussi efficacement dans les arbres morts, ne briderait pas autant un poisson et ne gagnerai pas autant de temps en rangement soigneux de son si cher matos. Les cannes ne sont plus déposées, elles sont directement jetées au fond du bateau, pour un changement de leurre plus rapide. Les hameçons plantés dans les branches et difficilement accessibles pour un décrochage aisé sont cassés et abandonnés, la corrosion fera rapidement son travail. Les leurres sont tassés dans les boites, et tant pis s’ils s’abîment et si les peintures s’écaillent. Le fil est changé à la fin de chaque manche. Les hameçons abîmés ou suspectés de l’être finissent leur vie au fond de la poubelle. Le fait d’être choyé par son sponsor offre un réel confort et une meilleure efficacité en concours (qu’en théorie heureusement !).

Pour le sponsor (commanditaire), l’avantage de cette association est encore plus importante : il y gagne plus que le sponsorisé, mais c’est normal sinon, l’association n’aurait plus lieu d’être. Ce n’est pas une relation symbiotique où chacun joue sa vie dans la relation. C’est une relation de coopération, l’important est que chacun y trouve son compte. Personne n’a jamais vu le bernard-l’hermite bouffer l’anémone qu’il a sur le dos ! Par contre, il peut s’en séparer si elle devient trop lourde...

Le sponsor trouve en son pêcheur un interlocuteur privilégié en contact direct avec les autres pêcheurs. Il peut le consulter n’importe quand lorsqu’il entend un bruit (radio-pêche) et l’utiliser comme espion ( !) ou à simple titre de renseignement.
Si le nouveau prototype est foireux, l’avis du sponsorisé fait gagner un temps précieux et évite les bourdes commerciales coûteuses.
Le sponsorisé peut orienter son commanditaire sur ses stratégies commerciales en anticipant les tendances de demain.
Enfin le sponsorisé est une maind’œuvre compétitive pour les salons et les animations. Nul besoin de le rémunérer, il est bénévole. Eclairé, technique, détaillé, son conseil est parole d’évangile et indiscutable : la vérité c’est lui.

La fameuse question, la voilà…

Comment trouver un sponsor ?
Avant de répondre de manière détaillée à cette interrogation, je vais en poser une autre : pourquoi en chercher un ?

Si c’est pour répondre à un besoin de reconnaissance, aller plutôt consulter un psy, vous perdrez moins de temps et serez soignés plus efficacement.
Si c’est pour pavaner dans les salons habillés en homme sandwich, laisser tomber. Vous perdrez de précieux week-end de pêche. Mais sûrement que la pêche n’est pas pour vous votre priorité…
Par contre, si attraper du poisson est pour vous une philosophie de vie, si la pêche est votre seul Eden sur terre, si vous souhaitez intensifier votre pratique pour progresser encore et si seul un soutient financier ou matériel vous permettrait de pêcher encore d’avantage et mieux, alors tenez compte des conseils qui suivent.

La compétition est un vrai terrain de rencontre. Les principaux acteurs actifs du monde halieutique sont présents, détendus, dans leur tenue de soirée ( !) donc facilement identifiables. Ils ne sont pas, comme sur un salon, submergés de clients, stressés et fatigués. Ils sont frais (enfin, pas toujours), disponibles, souriants, dans leur élément : la pêche.


Vous faire repérer
La compétition est une formidable vitrine, aujourd’hui la seule. Vous pouvez voir et vous montrer. Mais il ne faut pas croire qu’il suffit de franchir ce cap de l’inscription pour obtenir un contrat. Il faut s’inscrire à plusieurs concours, répondre présents, c'est-à-dire bien se classer ou gagner une manche. Bref il faut prouver que vous savez pêcher et vous montrer. Il faut que vous soyez repérables et la meilleur façon, la plus indiscutable de toutes : monter sur le podium. Se faire repérer par vos pitreries ne vous apportera qu’une étiquette de singe difficile à décoller.

Avoir un bon rayonnement

Se faire repérer par le monde de la compétition et des sponsors, c’est déjà une étape. Il faut à présent montrer que vous rayonnez. Si vous dîtes que tel ou tel produit, utilisé de telle manière est très efficace, mais que personne ne vous entend, c’est comme si vous n’aviez rien dit.
Par l’intermédiaire d’un site internet, d’une revue ou d’un autre média, on accède facilement à un plus grand nombre de pêcheurs. Ce n’est pas obligatoire mais utile. Dans un but similaire, il est bon d’envoyer des photos aux magazines et nouer des contacts avec eux. Un magazine est friand et grand consommateur de photos. Mais attention, réservez leur des bonnes photos en exclusivité.

Avoir la « good attitude »

Cela peut vous paraître stupide, mais dans le domaine de la communication, il y a des choses à raconter. Les pêcheurs ne vous connaissant pas se feront une image de vous, composée avec des bribes et recollée avec des morceaux manquants. Le résultat final, infidèle, sera associé à la ou les marques que vous représentez. Au final, les gens se feront un film avec 2 photos, il vaut mieux qu’elles soient bonnes, non ?
En communication, il y a ce que vous voulez dire, ce que vous dîtes, ce que les autres comprennent, et ce qu’ils répètent. Il faut donc qu’à la base, le message soit lumineux, car il sera de toute façon déformé. Plus le message est clair au début, plus il sera ressemblant à l’arrivée. Votre but n’est pas de jouer l’acteur, heureusement. Mais le commanditaire cherchera un pêcheur en accord, par son attitude et sa réputation, avec les marques qu’il vend. Il faut donc être vous-même, plus que d’habitude.


Organiser sa recherche

Mettez-en plein la vue : comme pour une recherche d’emploi, il est nécessaire de réaliser un CV orienté vers le type de sponsor que vous recherchez. Indiquez votre palmarès et la raison pour laquelle vous sollicitez ce sponsor. Appropriez-vous l’image que véhicule sa marque. Proposez-lui des photos pour son catalogue et des reportages pour son site internet. Réalisez quelques vidéos au préalable, histoire parachever la démonstration.

Négocier son contrat
Il existe plusieurs formes de contrat, qu’ils soient tacites ou écrits. Ne vous laisser pas embobiner trop facilement. Les petits jeunes, plein de rêves et de motivation sont des proies faciles pour les vieux briscards du business halieutique. « Tiens petit, voilà ta chemise ! Tu auras le matos quand tu ramèneras un résultat. ». Les contrats de ce type foisonnent chez les compétiteurs débutants. Il faut refuser catégoriquement ce type d’accord. D’abord parce que vous montrez que vous êtes faibles et prêt à n’importe quoi pour une chemise. Mais surtout, le commanditaire saura que vous vous contenterez de miettes : 5 leurres par ci, 1 canne par là, bref rien de très intéressant. Ce type d’accord n’est pas du sponsoring, c’est de l’exploitation : en biologie cela s’apparente au parasitisme.


Il faut clarifier la situation : vous apporterez bien plus au sponsor qu’il ne vous apportera et c’est bien normal. Posez vos conditions de manière nette et honnête : pas d’économie et pas d’abus.

Démarrez par un exposé exhaustif de ce que vous avez réellement besoin. Exemple : 10 cannes, une série de 5 crankbaits en 3 profondeurs (15 en tout), une série de 10 minnows, 25 jigs, 30 pochettes de LS, 3 000 mètres de fil, etc. Puis, chiffrez le total pour vous faire idée.
Attention, il faut savoir appuyer où l’on peut. Si vous vous adressez à un fabricant de fil, vos 3 000 mètres seront de la rigolade pour lui. En revanche, si le sponsor n’est pas fabricant et qu’il importe du nylon haut de gamme, les 3 000 mètres ne seront peut-être pas très judicieux à demander. Préférez appuyer ailleurs.

Les sponsors les plus puissants proposent également un défraiement lors des compétitions : carburant bateau et voiture, frais de route, hébergement, inscription. Généralement, les frais d’inscriptions sont facilement réglés par le sponsor, pour le reste, faites appel à votre force de persuasion.



SITUATION ACTUELLE ET DERIVES

N’en déplaise aux grincheux et aux déclinologues, le sponsoring est en place. Tant qu’il reste dans l’espace qu’on lui a assigné et qu’il ne s’en échappe pas, il ne posera pas de problèmes majeurs. En compétition, sur les photos et les films, les marques s’affichent et c’est tant mieux. Les mecs en veste et pantalon kaki, on en a assez vu comme ça ! Il est temps que le mot « pêche » s’affranchisse des termes « chasse » et « traditions ». Le sponsoring affiché de certains est une petite brise d’air pur et frais sur notre univers. Et si les plésiosaures grabataires pestent aujourd’hui contre ce phénomène, c’est qu’ils ont perdu la mémoire. Ils ont oublié qu’il y a quelques années encore, les seuls leurres présents dans les rayons étaient les mêmes qu’il y a 30 ans. Ils ont effacé de leurs souvenirs les animations en magasin réalisées de mains de maîtres par ces mêmes hurluberlus qu’ils dénigrent aujourd’hui. Alors, serait-ce l’ingratitude qui les a fait oublier que c’est grâce à ces figures sponsorisées qu’ils ont eu la révélation des joies de la pêche sportive aux leurres ?
Ou alors est-ce l’inquiétude d’une dérive ? Ce serait alors une critique constructive… C’est déjà mieux. Il est vrai que si l’on regarde par-dessus l’atlantique (oui je sais c’est pas évident !), chez nos lointains cousins les américains, le sponsoring a pris des proportions intéressantes. Je n’ai pas encore dit « inquiétantes ». Si les grincheux du sponsoring ont peur que la situation devienne la même chez nous, je comprend et partage leurs inquiétudes. Au nom du spectacle et du marketing, les poissons sont abîmés, maltraités, sacrifiés inutilement (durant l’attente de la pesée), et la souffrance animale y prend la même proportion que dans un corrida.
Mais le sponsoring n’est pas le responsable, il n’est que l’une des conséquences du marketing (la moins dangereuse).


En fait, le principal reproche fait aux sponsorisés est leur manque de franchise. On les suspecte de mentir pour faire le jeu de leur commanditaire.
Il faut bien se dire une chose : pour qu’un compétiteur vous livre ses secrets, il va falloir le torturer. Il ne lâchera rien. Rien de rien sinon des mensonges. Le seul moyen de lui dénouer la langue, c’est de le questionner sur les produits qu’il utilise. Là, il s’expliquera. Eh oui, c’est le jeu ma pauvre Lucette ! Mais si vous êtes comme moi, vous savez bien que le produit est moins important que l’utilisation que l’on en fait. Finalement, heureusement que le sponsoring existe. Le monde n’est pas si injuste !

La situation actuelle est celle-ci : c’est le sponsoring qui permet la mise sur le domaine public des nouvelles techniques. L’inventeur du drop shot aurait pu ne rien dire et continuer à remplir son congélateur ou à collectionner les titres. Dietmar Asaiach aurait pu ne rien dévoiler sur la Verticale lors des premiers numéros de Predators. Guillaume Martino n’aurait pas parlé des swimbaits et je n’aurais même pas parlé de lui…

 

 

 

 

Publié dans divers

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